Studiolo 1-2002, Anne-Lise DESMAS, Pierre de L'Estache (1688 ca. - 1774)

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bibliographie

11

Divinités mythologiques

1725

statues

plâtre ou carton-pâte ; [h : 2,5 à 6 m selon les figures]

Rome, place Navone, machine pyrotechnique pour le feu d'artifice tiré le 4 octobre 1725 en l'honneur du mariage de Louis XV

perdu

œuvres en rapport :

Machine pyrotechnique pour les noces de Louis XV

1725

Machine pyrotechnique pour les noces de Louis XV

1725

estampe anonyme

Machina artificiale rappresentante il Monte Olimpo con le Nozze di Cupido e Psiche allusiva a quelle delle Maesta Cristianissime di Luigi XV e di Maria principessa di Polonia fatta ardere in Roma il dì 4 ottobre dall'E.mo e R.mo Sig.re Card. di Polignac, ministro di Francia l'anno 1725

estampe anonyme

Machina artifiziale rappresentante il Monte Olimpo con le Nozze di Cupido e Psiche allusiva a quelle delle Maesta Cristianissime di Luigi XV e di Maria rè e regina di Francia nel an. 1725

eau-forte ; H : 0,532 m ; L : 0,316 m

Rome, Museo di Roma, inv. G.S. 245.

eau-forte ; H : 0,343 m ; L : 0,242 m

Rome, Museo di Roma, inv. G.S. 244.

            La participation de Pierre de L'Estache avec Edme Bouchardon et Lambert-Sigisbert Adam au décor de la machine pyrotechnique élevée place Navone, lors des fêtes qu'organisa le cardinal de Polignac en l'honneur du mariage de Louis XV, repose sur une mention du Diario de Francesco Valesio. Ce dernier nota en date du 22 septembre 1725 qu'avait été commencée la pose du décor sur la machine de bois construite par Filippo Creuli d'après le projet de Pier Leone Ghezzi. Le 26, il indiqua que l'œuvre était terminée depuis le matin et précisa à propos des statues « figure fatte e dipinte con bellissima simetria e con l'opera ed assistenza di giovani scultori della Accademia di Francia », information qui peut être considérée exacte compte tenu de l'amitié qui liait Valesio à Ghezzi.

            Le cardinal de Polignac, dès la première année de son ambassade à Rome, ne perdit pas l'occasion d'éblouir les Italiens en célébrant avec une grande pompe dans la Ville éternelle les noces de Louis XV et Marie Leczszynska. Outre les festivités organisées dans la cour de son palais Altemps, aménagée pour les circonstances en une extravagante scène de théâtre, un énorme feu d'artifice, selon la tradition romaine, fut organisé place Navone. L'ambassadeur de France s’était rapidement lié d’amitié à Rome avec Pier Leone Ghezzi, qui était peintre de la Chambre Apostolique depuis 1708, mais également caricaturiste, dessinateur d'antiques, numismate et collectionneur (Lo Bianco, 1985, Martinelli, 1990, Lo Bianco, 1999). Le cardinal de Polignac chargea ainsi le célèbre artiste de concevoir la gigantesque machine pyrotechnique qui fut construite par Filippo Creuli, alors architecte de la Congrégation de Saint-Louis-des-Français (Contardi, Curcio, 1991, p. 346).

            Outre une description méticuleuse de la machine imprimée pour l'occasion (voir document ci-dessous), plusieurs estampes furent gravées pour immortaliser cette œuvre éphémère représentant Les Noces de l'Amour et Psyché sur le Mont Olympe. Disposé sur un haut piedestal orné d'un ange qui arbore les armes de France et de Pologne, un énorme rocher, au pied duquel la Seine et la Vistule représentés par deux hommes barbus accompagnés d'un cheval et d'un ours renversent des amphores, est surmonté de gros nuages et symbolise le Mont Olympe habités par plusieurs divinités. Les noces de l'Amour et de Psyché sont célébrées en présence de Jupiter avec son aigle, des trois Grâces, de Vénus sur son char, de Pallas armée de sa lance, d'Apollon ou Orphée jouant de la lyre, de deux satyres soufflant dans leur flûte de pan et de plusieurs petits anges portant des guirlandes de fleurs. La conception de cette machine, qu'il faut s'imaginer polychrome, reposait essentiellement sur une imitation la plus illusionniste possible d'une nature qui se voulait sauvage et fantastique. Sous l'influence de la Fontaine des Fleuves du Bernin, le thème de la montagne et des roches artificielles était très souvent présent dans les machines du XVIIe siècle, telle celle élevée par Antonio Giorgetti pour commémorer la naissance de don Carlos d'Espagne en 1662, et persista au XVIIIe siècle accompagné toutefois d'un élément architectural antique comme un temple pour la fête de la naissance de l'Infant d'Espagne en 1727, ou une colonne pour La Forge de Vulcain réalisée en l'honneur de Maximilien d'Autriche en 1775 (pour ces exemples voir Fagiolo, 1997). Le texte de description détaillée imprimé pour la fête (dont un exemplaire est annexé au Diario de Valesio sans avoir été inserré par Gaetana Scano dans son édition du manuscrit) permet de préciser que le grand rocher s'élevait à une hauteur d'environ trente-six mètres sur une base d'une largeur de vingt mètres. Les dimensions de toutes les statues ne sont pas mentionnées mais le relevé des hauteurs respectives de six et deux mètres cinquante pour les Fleuves et les Putti suffit à imaginer l'ampleur du décor sculpté. La base était peinte couleur de pierre, les flots émergeant des cruches renversées par les Fleuves étaient argentés et de nombreux lys de France dorés ornaient tout le Mont Olympe.

            La fête prévue pour le 26 septembre 1725 dut être reportée, à cause de la pluie, à la soirée du 4 octobre. Tous les palais de la place Navone furent illuminés et une équipe de spécialistes, artificiers et bombardiers, firent incendier la machine pyrotechnique, offrant à la noblesse présente aux balcons ornés de tapisseries et à la foule romaine gourmande de sensations un feu d'artifice spectaculaire (Diario Ordinario, 1725, n° 1272, p. 15, n° 1275, p. 10-11). Le Mercure de France dans son numéro de décembre transmit à Paris l'écho du succès que remportèrent à Rome ces festivités et fut très élogieux pour le cardinal et le peintre Ghezzi « devenu pour ainsi dire l'arbitre des Arts » : « une fête organisée par S[on] é[minnence] et dirigée par le chevalier Ghezzi ne pouvoit pas manquer de réussir » (Mercure de France, 1725, décembre, vol. 1, p. 2787-2788. Une gravure de Charles-Nicolas Cochin y est reproduite, « Cav. Ghezzi inv. / C.N. Cochin f. », et reprend celle inventoriée G.S. 245 du Museo di Roma sans figurer les personnages au bas de la machine :« Voici l'estampe reçue de Rome, réduite à la juste moitié de sa grandeur, que nous avons fait graver pour la satisfaction de nos lecteurs »).

            La formule « opera e assistenza de giovanni scultori della Accademia di Francia » employée par Valesio dans son Diario semble permettre d'attribuer aux sculpteurs français la réalisation du décor même si l'intervention de « festaroli » spécialisés dans les décorations éphémères n'est pas à exclure. Il est toutefois impossible de déterminer quelles statues furent respectivement confiées aux sculpteurs parmi les quatorze figures de dieux et déesses, petits amours non compris, qui peuplaient le gigantesque rocher.

            Il est aisé de comprendre pourquoi le nouveau directeur Vleughels, dans les nouvelles qu’il envoya au duc d'Antin sur les festivités, n'écrivit rien concernant la participation de Bouchardon, Adam et L'Estache au décor sculpté de la machine (C.D., VII, p. 210, 211, 215). Les pensionnaires devaient exclusivement travailler pour le roi; les commandes privées, même pour les ministres de France, étaient interdites. Le cardinal, qui dès son arrivée porta un vif intérêt à l'Académie, avait sans doute suggéré à son ami Ghezzi de faire travailler les sculpteurs français. Pierre de L'Estache, qui avait eu dans l'atelier de Slodtz quelque expérience du décor éphémère, réussit-il à s'imposer face aux deux jeunes élèves Adam et Bouchardon ? Plus qu'une ambiance de compétition, une atmosphère festive dut s'imposer lors de la réalisation du décor du rocher. Contrairement à l'étude de l'Antique ou d'après le modèle qui devait leur paraître parfois ennuyeuse, les grandes figures offraient aux artistes la possibilité de laisser libre cours à leur fantaisie. Habitués à tenir compte des propriétés du marbre, ou même de la terre destinée à être cuire, les sculpteurs pouvaient jouir, dans l'utilisation du carton-pâte ou du stuc, d'une matière peu contraignante. La peinture dont étaient recouvertes les statues pour mieux feindre la nature devait apparaître comme une expérience originale pour des artistes habitués à la monochromie de leurs créations. Tirés de la mythologie, tous les personnages laissaient aux sculpteurs la possibilité de s'inspirer librement de l'Antique. Le groupe de Pan et Apollon, alors propriété des Ludovisi, et la Minerve Giustiniani peuvent notamment avoir servi de modèles pour les figures de Satyres et de Pallas. D'après les estampes, le contraste entre les statues féminines élégantes et précieuses, comme le suggèrent la gestuelle maniérée de Vénus, celle fantastique des Satyres, et celle imposante du Jupiter ou des deux Fleuves devait être particulièrement réussi. Ces trois dernières figures, par leur attitude contorsionnée, leur anatomie vigoureuse, et l'expression puissante des visages paraissent d'ailleurs annoncer certaines œuvres de Lambert-Sigisbert Adam. Il est toutefois impossible de déterminer avec précision la participation de chaque sculpteur et l'importance des directives données par le chevalier Ghezzi.

            Les estampes ont été présentées à de nombreuses expositions romaines et souvent publiées (Il Settecento a Roma, 1959, cat. 1813 ; I Francesi a Roma, 1961, cat. 505 ; Pietrangeli, 1971, p. 133 ; Tozzi, 1982, p. 24, cat. 2 p. 28, fig. 2 p. 35 ; Moli Frigola, 1985, p. 167-169, fig. 3, 5 ; Gori Sassoli, 1994, p. 28-29, cat. 128-129, La Festa a Roma, 1997, I, p. 197, fig. 19 p. 198, II, fig. 1 p. 231, fig. 2 p. 236). La participation des sculpteurs de l'Académie de France au décor du Mont Olympe, selon le passage du Diario de Valesio, n’est reporté que dans le Corpus delle Feste a Roma (Fagiolo, 1997, p. 98).

bibliographie :

Fagiolo, 1997, p. 98.

sources :

1725, 26 septembre, nouvelles données par Francesco Valesio concernant le décor de la place Navone pour la fête organisée en l'honneur du mariage de Louis XV :

(Valesio, IV, p. 585-586)

Erasi questa mattina già terminata la bellissima machina di fuoco in piazza Navona, disegnata dal cavaliere Ghezzi ed eseguita dall'architetto Creccoli [Creuli]. Questa rappresenta la favola delle nozze di Psiche, tolta dal VI libro di Apuleo ; nella parte più alta eravi un Giove sopra l'aquila e poco più sotto su nuvole Venere sopra il carro e in disparte o quasi fuori della faccia principale Giunone. Sotto a queste, era Amore con Psiche, laquale avea in mano la tazza del nettare per la immortalità portagli da Ganimede, e allo stesso piano all'altro fianco Pallade con l'asta ; su le nuvole, che terminavano graziosamente sopra un gran monte, era sedente Apollo con la cetra e poco più sotto a sedere sopra un balza due satiri che suonavano la siringa e la zampogna ; nel mezzo e sotto in tutte le tre facce due genii alati che facevano serti de fiori ; finalmente a pié del monte da una parte il Rodano e la Senna, fiumi della Francia, con un cavallo a lato e dell'altra la Vistola fiume della Polonia, con un orso, figure fatte e dipinte con bellissima simetria e con l'opera ed assistenza di giovani scultori della Accademia di Francia. Nel gran basamento era dipinto Amore che stendea ambedue le braccia su l'armi della Francia e della regina sposa, che è una testa di bufalo in campo d'argento, posta nel mezzo dell'arme del regno di Polonia : del che ne ha fatte doglianze il conte Lagnaschi ministro del re Augusto, non essendo stato mai dalla Sede Apostolica riconosciuto per re di Polonia l'eletto Stanislao di casa Lentzkiski che i fiorentini la vogliono derivata dalla casa Lenzi di Fiorenza con una falsa stiracchiatura, perché quella famiglia ha l'origine della Moravia.

document :

[1725], relation concernant le feu d'artifice exécuté place Navone le 4 octobre 1725 en l'honneur du mariage de Louis XV :

(A.C.R., Camera Capitolina, Credenza 14, vol. 7, fol. 66-67)

Distinta Relazione e Notizie Della Macchina di Fuoco Artificiale, fatta in Piazza Navona destinata per il giorno di Mercoledì 26, di Settembre e differita a 4 Ottobre 1725 e di altre allegrezze ordinate dall'E.mo e R.mo Prinicipe, il Signor Cardinale Melchiorre di Polignach Ministro di S. M. Cristianissima nella corte di Roma, In occasione delle Reggie Nozze dell'istesse Sagre e Reale Maestà di Luigi XV e Maria.

[…]

Ergevasi dunque questa gran mole figurando il Monte Olimpo nella sua altezza di palmi 160 principiando la sua Base con un Zoccolo ideato alla Reale in figura ottangolare al punto centinato, e dipinto a colori di Pietra, ove bianca, ove mischia di larghezza palmi 90 con scherzo di cupidi alati nella facciata di mezzo sostenenti li Scudi ove erano espresse le Armi de Sposi Reali, corrispondente con proporzione uniforme nei suoi Lati di larghezza palmi 60 ciascuno, che formava il primo Ripiano, sopra cui principiava il Montuoso dalla sallita di esso, ricoperto di nuvole al naturale disposte, ove vedevansi effigiati in due Statue ciascuna dell'altezza di palmi 28 coronate di Alghosi ornamenti distinti con Animali al lato, cioè l'Orso, e Cavallo Geroglifici di due Fiumi Reali nomati la Senna, e Vistula che con suoi fluvidi Argenti inondano le Provincie di quel Vastissimo Regno, questi scaturivano dalle radici di detto Monte con impetuose sorgenti, con cui sembrava minacciassero guerra, a chi osava opporsi al loro intrapreso viaggio, scherzandovi al di sopra nel mezzo di essi due Putti alati con cesto di frutti, e fiori alle mani. Dopo ciò nell'ascendere il detto Monte nel più basso del lato sinistro scorgevansi situate due Statue consimili rappresentanti due Satiri, che con Musicali Instrumenti di Flauto, e Siringha figuravano formare un sonoro concerto con la meravigliosa Lira d'Orfeo, che figurato anch'elli in altra Statua in proporzionata distanza nel lato destro situata applaudivano alle presenti allegrezze.

Nel Centro poi, o sia Promontorio più esposto di detto Monte vedevansi situate due Statue rappresentanti Cupido, e Psiche, che in atto di congratularsi per li seguenti Imenei con la vaghezza de' loro Colori, e dispostezza di ornamenti recavano ammirazione, a piede de quali era situata altra Statua, che figurava Imeneo in atto inserviente, e genuflesso, porgendo alli Sposi Reali sopra con aurato Descho una Tazza con cui inanimavali ad accendersi di scambievole Amore fra essi ; Assistente a nozze così felici nel lato destro appariva Venere la Madre di Cupido, che tirata nel suo vago Carroda Candide Colombe al più non posso vezzosa, con Pallade Armata al di dietro del di lei Cocchio applaudivano queste favolose Deità a nodi soavi de' delineati Sponsali di Cupido, e di Psiche.

Coronavasi altresì non men l'opera magnifica, che la cima del Monte con la presenza di Giove figurato in una gran Statua sostenuto da un'Aquila non già armato di fulmini, ma placido e avvenente, con le tre Grazie effigiate in tre Statue di consimile struttura, e vaghezza in atto di concertare aiuti gratificanti a pié de sposi presenti ; concorrendo per fine alla perfezzione dell'ornamento nel compendiato Monte di meraviglie non meno moltissimi geni effigiati in Putti alati dell'altezza di palmi 12 che moltissimi Gigli messi ad oro con chiari scuri Gerolifici della Stemma Reale di S. M. Cristianissima distribuiti in varie parti, e lati del Monte, che rendevano in vero non men l'opera al maggior segno ammirabile, che eccitavano i geni de' risguardanti a prorompere in Encomi festivi di è viva in lode de' Conjugati Reali, e dell'E.mo Porporato loro degnissimo Ministro. […]